En se rendant à Chartres, Charles Péguy (écrivain poète et essayiste 1873 – 1914) aperçoit sur le bord de la route un homme qui casse des cailloux à grands coups de maillet.
Les gestes de l’homme sont empreints de rage, sa mine est sombre.
Intrigué, Péguy s’arrête et demande :
– « Que faites vous, Monsieur ? »
– « Vous voyez bien », lui répond l’homme, « je casse des pierres ».
Malheureux, le pauvre homme ajoute d’un ton amer :
-« J’ai mal au dos, j’ai soif, j’ai faim. Mais je n’ai trouvé que ce travail pénible et stupide ».

Un peu plus loin sur le chemin, notre voyageur aperçoit un autre homme qui casse lui aussi des cailloux. Mais son attitude semble un peu différente.
Son visage est plus serein, et ses gestes plus harmonieux.
– « Que faites vous, Monsieur ?», questionne une nouvelle fois Péguy.
– « Je suis casseur de pierres. C’est un travail dur, vous savez, mais il me permet de nourrir ma femme et mes enfants. » Reprenant son souffle, il esquisse un léger sourire et ajoute :
-« Et puis allons bon, je suis au grand air, il y a sans doute des situations pire que la mienne ».

Plus loin, notre homme, rencontre un troisième casseur de pierres.
Son attitude est totalement différente. Il affiche un franc sourire et il abat sa masse, avec enthousiasme, sur le tas de pierres. Pareille ardeur est belle à voir !
-« Que faites-vous ? » demande Péguy.
-« Moi…Je bâtis une Cathédrale ! » lui répond l’homme les yeux remplis de lumière.

(Le tableau en illustration « Les Casseurs de pierres » est de Gustave Courbet.)

La semaine prochaine, rentrée oblige, je reprendrai les thèmes habituels traités sur les Sexygénaires.
Je suis heureuse d’avoir pu partager tout l’été, ces belles histoires avec vous. Elles vont beaucoup plu si j’en crois les gentils commentaires reçus…